Histoire de notre lycée
Extraits d’un article paru dans le bulletin N° 2 de l’UAALA,
avec l’aimable autorisation de ses
responsables.
Historique du lycée Delacroix .... De 1903 à 1945
Le plus vieux lycée de Jeunes filles d’Alger, si cher au cœur de beaucoup d’entre nous, était situé en plein centre ville, rue Michelet, qui sera rebaptisée dans cette portion, rue Charles Peguy, beaucoup plus tard. Cette grande bâtisse rectangulaire, construite en 1903, à la façade classique, surmontée d’une balustrade où donnaient les appartements administratifs, possédait une belle porte en chêne massif et une volée d’escalier en marbre; les jeunes élèves montaient le cœur battant, impressionnées par ces vastes proportions et la présence des Surveillantes Générales dans le hall, après avoir revêtu leurs tabliers de vichy bleu et blanc dans le vestiaires du bas à gauche, sous l’œil sévère de la concierge qui ne tolérait aucun retard. Dans la grande cour rectangulaire, donnaient les salles au fond, un vaste préau derrière lequel avait été aménagé un gymnase moderne, probablement à la place du réfectoire, car cet établissement possédait à ses débuts, un internat, dont les dortoirs se trouvaient au dernier étage, avant de devenir un externat, lorsque le lycée Fromentin fut créé en 1938 avec son magnifique internat dans le parc du « Splendid ». Selon le témoignage des plus anciennes d’entre nous, il fut construit par une Association privée puis devint « Ecole Secondaire de Jeunes filles de la Ligue de l’Enseignement » - appelé « La Ligue ». A partir de 1914 l’hôtel « Splendid » fut son annexe. Les élèves y montaient par un petit tram faire la gymnastique, les fêtes de fin d’année y avaient lieu. La première directrice, l’excellente Mme SANS, présidait la petite cérémonie de « lecture des notes », complimentant ou réprimandant, mais toujours avec bonté; chaque mois elle remettait aux élèves le billet rose du « tableau d’honneur ». Pendant la guerre 1914-1918, les classes secondaires furent transférées au « Petit lycée de Mustapha » (garçon) – plus tard lycée Gautier – le matin étant réservé aux filles et l’après-midi aux garçons. La ligue fut, pendant cette période de guerre un hôpital militaire où furent soignés les blessés des Dardanelles. Les élèves étaient les marraines des combattants et tricotaient chaussettes, cache-nez, avec des aiguilles faites de baleine de parapluies …et expédiaient des colis aux soldats. L’une des plus anciennes pensionnaires se souvient de la liesse générale qui s’empara de toutes les élèves lorsque la directrice Mme SANS vint annoncer l’armistice du 11 novembre 1918, alors que toutes les cloches carillonnaient. Les élèves coururent embrasser les blessés dans la cour … Mme ELICHABE succéda à Mme SANS; elle fut également une grande directrice qui ne quitta le lycée que pour prendre la direction du lycée Fénelon à Paris (alors le plus grand lycée de jeunes filles de France). La ligue comptait alors : une classe enfantine et cinq classes primaires, dont les remarquables enseignantes ont laissé des souvenirs émus et reconnaissants à leurs élèves ... Mme HATINGUAIS prit donc la suite de Mme ELICHABE, et, après la séparation en 1923 de l’annexe du « Splendid » (« le lycée d’en haut »), devint la directrice du lycée Fromentin qui en 1930 devint lycée d’Etat. Mme BERRIER se voyait alors confier la direction du « lycée d’en bas », qui lors d’une brève cérémonie en 1941 fut baptisé « lycée Delacroix ». Elle y resta jusqu’à sa retraite en 1956. Mme BERRIER fut une directrice de grande distinction, de grande rigueur et pourtant d’extrême gentillesse. Lorsqu’elle rendait les carnets de notes à la fin de chaque mois, elle appelait chaque élève par son prénom et après avoir fait le commentaire objectif de ses résultats, ajoutait toujours un mot d’encouragement. Elle inspirait le respect mêlé d’admiration. La période de 39-45 fut dramatique : la première partie de 39 à 42, austère, avec le lever au drapeau, chants patriotiques tous les lundis matins, puis la seconde partie, du débarquement allié le 8 novembre 42 à fin 43, dangereuse, sous les bombardements quasi-quotidiens. Le lycée Delacroix fut le seul à continuer à fonctionner, tous les autres ayant été réquisitionnés pour servir de caserne aux troupes anglo-américaines. Filles et garçons qui n’avaient pu être évacués dans l’intérieur se relayaient, mais n’avaient cours qu’une demi-journée par semaine; certains ne venaient à Alger que pour cela et repartaient faire leurs devoirs au bled. Souvent pendant les cours, les sirènes hurlaient et il fallait sortir en bon ordre se réfugier dans le tunnel des facultés tout proche, qui commençait à être percé et servait d’abri. Des bombes tombaient tout autour …directrice, surveillantes, professeurs restaient à leur poste pour assurer le service. Les cours ne devaient être rétablis complètement qu’à la rentrée 1944, quand les autres lycées furent libérés. Le 8 mai 1945 reste un jour mémorable pour beaucoup d’entre nous : l’annonce de l’armistice fit sortir les garçons de leurs lycées. Ils forcèrent sans grande peine la porte du lycée en criant : « C’est la victoire ! Les filles avec nous ! ». Dans un enthousiasme délirant, nous les rejoignîmes dans la cour, en sautant par les fenêtres des classes du rez-de-chaussée, bravant l’opposition des surveillantes, et bras dessus, bras dessous, nous partîmes en joyeux monôme, chantant « La Marseillaise » et « Les Africains », etc … à tue-tête, depuis la rue Michelet jusqu’à la place du Gouvernement au-dessus de laquelle des avions lâchaient de petits drapeaux tricolores et où se disloqua le cortège épuisé…
Plan fourni par J.P Follacci
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Les photos qui suivent sont extraites d'un album édité en 1913, qui nous a été communiqué par : Josette Bidault-Deldicque (de cet album, sont également extraites les photos de classe de l'année 1913 - cf. rubrique "photos de classes") . Cliquez sur les photos pour les agrandir
La cour du lycée
Séance de gymnastique
Le dortoir
Le réfectoire
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