ANDRÉ MILLECAM : ÉTONNANT VIRTUOSE

Par Michèle Salério


   Du fait de notre parenté, j'eus très jeune l'occasion d'être le témoin ébloui de ses prouesses pianistiques, au cours d'interprétations ou d'improvisations (exercice dans lequel il excellait !). D'autant plus que la musique faisait depuis toujours partie de mon quotidien : Hélène travaillant son violon ou nous régalant de belles pièces du répertoire, dans cette maison de Notre-Dame d'Afrique qui n'en finit pas d'enchanter mes souvenirs.

   J'avais déjà, du haut de mes 7 ou 8 ans, très modestement commencé l'étude du piano ; c'est donc tout naturellement qu'André s'intéressa à la "petite nièce" ; et c'est tout aussi naturellement qu'il me prodigua des conseils, m'offrit quelques partitions, me faisant aussi découvrir par le disque des "classiques" et "modernes" incontournables.

   Mon éternel et inconditionnel "attachement" à la suite de ""Daphnis et Chloé" de Ravel, c'est à lui que je le dois, tout comme ma compréhension des pittoresques figures de Schmuyle et Goldenberg des "Tableaux d'une exposition" dont il m'expliqua le "traitement" par de simples accords, me révélant ainsi, de façon très vivante, les ressorts de la musique descriptive.

   Ces petites leçons improvisées et spontanées étaient toujours ponctuées d'humour, d'éclats de rire et souvent conclues par un joyeux : "y alors ? eh ben oilà !". Elles n'en furent pas moins pour moi de véritables approches sensibles, intelligentes, de la musique.

   Je retiens aussi le respect, la passion qu'il éprouvait pour l'instrument PIANO ; sentiment bien connu des musiciens de très haut niveau, quel que soit l'instrument d'ailleurs ! Ce contact au clavier qu'il savait traiter, malgré les fureurs de sa virtuosité, avec une infinie douceur : sous ses doigts la Berceuse de Chopin, celle qu'il jouait souvent et qu'il avait d'ailleurs enregistrée, révèle toute la tendresse, volontairement et pudiquement dissimulée, de sa brillante et si attachante personnalité.


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Coupure du Journal d'Alger du 2 septembre 1958 : interview d'André Millecam). (Coll. M.S.)


    * André Millecam est né à Mostaganem le 4 février 1929. Dès l'âge de 12 ans, il apprend le piano dans la classe de Gontran Dessagne à la Société des Beaux-Arts de la rue des Généraux-Morris et remporte en 1946 le Grand Prix de la ville d'Alger. Il part ensuite poursuivre ses études musicales au Conservatoire national supérieur de musique de Paris et entre dans la classe de Lazare Lévy. Il travaillera également avec Jacques Février et Louise Clavius. Lauréat des classes de piano, solfège et harmonie, il retourne en Algérie où il est nommé sur concours, professeur au Conservatoire d'Alger. Il y exercera jusqu'en 1962.

   À cette même date, il obtiendra un poste au Conservatoire national de musique de Toulon, puis dirigera pendant plusieurs années l'Ecole nationale de musique de Saint-Raphaël tout en officiant en tant que professeur à l'École municipale d'Hyères. Il était membre du conseil d'administration du Centre National de création de Châteauvallon à Ollioules, ville où il résidait. En dépit de ses nombreuses fonctions, travailleur boulimique et passionné, il donna aussi toute la mesure de son immense talent au cours de prestigieux concerts qui firent la joie de sa famille, de ses amis, de ses élèves et des mélomanes "avertis" de la région. La presse locale, toujours élogieuse ne manqua pas de se faire l'écho de ces inoubliables moments musicaux.

   "Un brillant pianiste, André Millecam : technique transcendante, de la flamme, l'amour de son art, bref une nature. Je marque d'un caillou blanc le jour où j'ai fait sa connaissance" écrivait à son propos dans les années 60, le critique musical Bernard Gavoty.









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