L'Aletti : ses fastes, ses fêtes.


ALLONS AU "GARGANTUA" POUR LE RÉVEILLON DU NOUVEL AN 1933 !

et finissons la nuit au "Sous-marin"
avec café au lait au p'tit déjeuner !



proposé par Gérald Dupeyrot


   Bon. Bientôt le nouvel an ! Je vais essayer de faire bref - pour une fois - pour vous annoncer ma Bonne Action (BA en abréviation louveteau) de Nouvelle Année.

   Il y a déjà un bout de temps, j'avais acheté sur un site d'enchères le Menu ci-dessus. L'intérieur, dont l'illustration et le menu, se trouve plus bas. C'est celui du dîner de réveillon de nouvel an 1933 au Casino Municipal. À cette date, deux ans après son ouverture, on ne disait pas encore "l'Aletti", comme on le dira bientôt, du nom de son patron. Pour la partie spectacles et réjouissances de l'hôtel, on dit encore "le Casino municipal". Mais "La Ville dans la Ville" est déjà devenue le haut lieu de la vie nocturne algéroise et des mondanités du gratin de la colonie (comme on disait alors). Tout ici dans ce transatlantique immobile est volupté et luxe, ici règne une ambiance "urf", selon le mot en vogue. Le dîner de réveillon de ce 31 décembre 1932 va se dérouler dans celui des restaurants de l'hôtel baptisé "Chez Pantagruel". Tout un programme !



Annonces dans l'Écho d'Alger du 31 décembre 1932
(j'ai conservé le communiqué de M. Peyrouton à la suite de celui de l'Aletti,
il ne se prive pas de dire aux fàcheux ce qu'il pense de leurs bons voeux.
En plus, la réduction de la paperasse, c'était écologique avant l'heure !)


   Et je me suis dit : "Pourquoi ne pas convier les Es'mmaïen(ne)s à fêter tou(te)s ensemble notre passage à la prochaine année ?". Aussitôt dit, aussitôt fait : voilà l'invitation lancée ! Appelez-moi, je me charge ensuite de réserver. On dit vers 20 heures, au bar du rez-de-chaussée côté rue de Constantine ? Pardon ? Alfred Lelluch ? Non, elle ne s'appelle pas encore comme ça… Pas avant une douzaine d'années au moins. Pour l'instant, c'est toujours la rue de Constantine. Mais chut ! Ce soir on ne lit pas dans le futur, ça pourrait nous gâter le plaisir… Les premiers arrivés attendent les autres. Ça va ? Pour ceux qui vont accepter l'invitation, et qui après le dîner ne se seront pas assoupis après s'être délectés de tant de bonnes choses un peu inhabituelles à la queue leu-leu (et je parle pas de chaque vin pour aller avec chaque plat ! Et du champagne !), et qui voudraient faire durer encore un peu la nuit avant d'aller se coucher dans une année toute neuve, pourquoi ne pas suivre cette suggestion d'aller finir la nuit à la boîte de nuit de l'Aletti, parue dans l'Écho d'Alger :




POUR SAVOIR CE QUE VOUS ALLEZ MANGER DE BON POUR 125 FRANCS,
VITE, PASSEZ LA SOURIS SUR LE MENU ! (SANS CLIQUER)

Pour quelques explications sur certains des plats proposés au menu,
se reporter en bas de l'écran.
Allez, bon réveillon, et bonne année !




Oui, on se gratte la tête en lisant ce menu quand on n'est pas intime avec la grande cuisine et les appellations de certaines préparations devenues des classiques. Moi-même, dont les parents n'avaient je crois jamais mis les pieds à l'Aletti, et pas familier du parler gastronomique, j'ai dû aller chercher sur Internet le sens de la plupart de ces noms de recettes. Et je dois dire que ça fait saliver. Quelques jalons, donc, pour participer pleinement à ce dîner…

Commençons par le commencement. Un "Consommé de volaille Aurore", c'est pas compliqué, c'est juste qu'on a rosi le consommé avec de la tomate. Ça vaut aussi pour la sauce du même nom, bon, passons, chacun sait cela.

"Suprême de saumon Joinvile" : il faut entendre que le saumon, en principe cuit dans un court bouillon, est accompagné d'une sauce de ce nom, c'est à dire une sauce hollandaise, à laquelle on a incorporé un beurre de crevettes (qui colore la sauce en rose pâle), des crevettes et de la truffe taillée en julienne. C'est pas cochon. Tu m'étonnes ! Créée en l'honneur du prince de Joinville, c'est Escoffier, "roi des cuisiniers et cuisinier des rois" qui a vulgarisé cette sauce.

Ah, le "Friand de ris de veau Maréchale" ! Certainement le clou de ce menu ! Cette recette mythique hors normes est aussi hors de prix. Elle nécessite des ris de veau dits "de coeur" (les "pommes de ris"), des truffes noires (compter une de 30-40 grammes pour deux ris) que l'on va cuire en infusion de Porto rouge, des asperges, crème, beurre, citron. C'est un article de Wikipedia en anglais qui nous renseigne le plus sur l'origine de cette appellation (cliquez ici). Pour vous dire le niveau du mets, c'est ce qui avait été servi à déjeuner, entre autres plats, au Roi d'Espagne Alphonse XIII le 3 juin 1905, au Palais de l'Elysée, au retour de la revue de Vincennes (1). Un plat littéralement royal, donc.

Un "chaud-froid" désigne tout apprêt de volaille, gibier, viande ou poisson que l'on prépare à chaud mais que l'on sert froid, nappé de sauce brune ou blanche et lustré à la gelée. C'est une appellation toujours utilisée, qui remonterait au Maréchal de Luxembourg (sous Louis XV), et dont il serait lui-même l'auteur. C'est ce que nous raconte joliment le Chef Simon sur son passionnant site gastronomique.

La salade Lorette, c'est un terme et un plat assez courants, vous pouvez la trouver à la carte de plein de restaus pas chichiteux. C'est une salade de mâche avec dedans des dés de berrerave et du celeri, le tout en vinaigrette. Tout est dans la qualité des produits et la science de la vinaigrette, pas donnée à tout le monde.

Pour le Panneton (c'est pareil que du Pannetone ?) et la mousse glacée Viviane, si des Es'mmaïens veulent bien éclairer ma lanterne…

Et au moment du pousse-café, soit que vous les aurez sur vous, soit qu'ils vous seront proposés par la petite vendeuse de cigarettes passant de table en table, les cigares Bastos contribueront à faire de la conclusion de ce dîner un moment d'extrême béatitude.



Annonce dans l'Écho d'Alger du 30 décembre 1932.


(1) voici l'adresse d'un site internet brillant, incroyabement riche, magnifique, "les menus de l'Histoire", qui fournit en particulier les menus des repas donnés à l'Élysée. Il devrait vous intéresser et vous amuser. Après lecture, on ne s'étonne pas que la plupart des Sénateurs de temps pas si anciens aient fini gorgés de diabète, de choléstérol et d'AVC. Nous-mêmes, Es'mmaïens qui avions été gentiment invités au restaurant de l'Assemblée Nationale par notre camarade Roland Blum, en un seul déjeuner un seul, nous nous étions déjà retrouvés avec la mine rubiconde de Gérard Larcher ! (cliquez ici). Nous étions dans un bel état, mais pas au point de nous être faits en si peu de temps aussi gros que le boeuf, pas encore les doubles mentons, la rotondité, et ce je ne sais quoi qui nous dit que le Président est sur le point d'exploser comme un pneu gonflé à 10 bars. Pas étonnant que les Sénateurs l'aient élu comme le premier d'entre eux !



"Punaise, ousque j'ai bien pu garer ma voiture en arrivant ?"


BONNE ANNÉE 1933,

BONNE ANNÉE 2019




En cliquant ici, découvrez la réplique de Dodièze

aux agapes pour belles personnes ci-dessus,

avec le Menu qu'il nous propose, rien que de la vraie cuisine de chez nouzautres !".