Daguerre : Petit Cordonnier...
Par Jean-Claude Saladin




      La rue Daguerre : j'y suis né il y a 60 ans, presque jour pour jour. Au numéro 26, quelques dizaines de métres plus haut que l'école de garçons, et j'y suis resté jusqu'en juin 1962 !

      Jean-Louis Jacquemin a éveillé en moi des souvenirs profondément enfouis.

      J'ai débuté ma scolarité en 1945 à l'externat Notre Dame d'Afrique, boulevard Saint-Saens, non par conviction religieuse de mes parents, mais tout simplement parce qu'ils travaillaient tous les deux, et qu'il n'y avait pas de place en maternelle à l'école Daguerre pour des enfants de mon âge.

      Je n'en garde pas, d'ailleurs, de trés bons souvenirs. La discipline y était vraiment trés dure, les punitions fréquentes. Pour une peccadille on se retrouvait à genoux en culotte courte sur les graviers de la cour de récréation.

      Je n'ai, enfin, été inscrit à l'école Daguerre (en CE1) qu'à la rentrée 1948. Je n'ai donc malheureusement pas pu y rencontrer Jean-Louis Jacquemin, puisqu'alors il entrait en 6éme à Gautier où je l'ai suivi 4 ans plus tard.

      Je ne dirai rien de l'école et des instituteurs, il l'a tellement bien fait.

      Ce sont les souvenirs de la rue Daguerre qui me reviennent avec le plus de force.

      Mon amie Monique née 6 mois avant moi dans le méme immeuble que moi. Nous ne nous sommes pratiquement pas quittés jusqu'à l'âge de 25 ans, méme en France. La vie a fini par nous séparer (....).

      Je me souviens également de la petite épicerie qui était à l'angle de la rue Daguerre et de la rue d'El Biar. Elle était tenue par les parents de mon copain Michel Santamaria. Il fallait monter quelques marches pour y accéder. On y achetait de délicieux bonbons et chewing-gums en sortant de l'école.

      Qui se souvient de l'échoppe qui se trouvait en face de l'école? Elle était tenue par un cordonnier, tout petit, vouté, déformé par la position qu'il avait dans ce minuscule local.

      Lorsque la chanson du petit cordonnier fut créée, les gamins sortant de l'école Daguerre, se faisaient un malin plaisir de chanter à tue-téte en passant devant l'échoppe, la ritournelle "petit cordonnier t'es béte, béte,...". Le pauvre homme sortait alors en brandissant son marteau et les garnements s'enfuyaient à toutes jambes.

      Plus tard l'école de garçons fut doublée par une école de fille construite de l'autre côté de la rue un peu plus haut juste en face du 26, mais j'étais plus grand et je fréquentais alors le Lycée Gautier.

Jean-Claude SALADIN,

le 20 novembre 2001

Le petit cordonnier

Un petit cordonnier qui voulait aller danser
Avait fabriqué de petits souliers
Une belle est entrée qui voulait les acheter
Mais le cordonnier lui a déclaré:
Ils seront à vous sans qu'ils vous coûtent un sou
Mais il vous faudra danser avec moi

Refrain
Petit cordonnier t'es bête, bête
Qu'est- ce que t'as donc dans la tête, tête
Crois-tu que mon coeur s'achète, chète
Avec une paire de souliers


Mais la belle accepta , elle emporta sous son bras
Les petits souliers pour aller danser
L'cordonnier tout réjoui a mis ses plus beaux habits
Et s'est pomponné pour la retrouver
Mais hélas quand il voulut la faire danser
Elle lui rit au nez d'un p'tit air futé.

Petit cordonnier t'es bête, bête...

Mais à peine la belle avait-elle fait trois pas
Que ses p'tits souliers furent ensorcelés
Elle se mit à tourner comme une toupie déréglée
Et les musiciens n'y comprenaient rien
Elle tourna, tourna jusqu'au petit matin
Et tout épuisée se mit à pleurer


Petit cordonnier arrête, rête
Tu me fais tourner la tête, tête
Tu ne dois pas être bête, bête
Pour m'avoir ensorcelée

Petit cordonnier arrête, rête
Que ta volonté soit faite, faite
Toute ma vie le coeur en fête, fête
Dans tes bras je vais danser
Gentil petit cordonnier

Paroles: Francis Lemarque, Musique: Rudy Revil 1953,
© Ed Tropicales