Es'mma !, pour s'émouvoir, se bouleverser, se retrouver, ne recule devant aucun sacrifice ! Alors Es'mma ! a envoyé dans le temps un reporter-photographe ! Et c'est Jean-Claude Saladin, émérite ancien qui s'y est collé !
Il s'est immergé dans notre passé (et aussi dans une malle de souvenirs dans l'appartement familial). Il a localisé la zone d'Algerissage: lycée Émile Félix Gautier; il remonte de quarante-quatre ans en arrière, 62... 60... 59... Il immobilise son chronoscaphe à la date d'une chaude journée de juin 1958. Il en descend, fait quelques pas dans la rue Hoche... Un frémissement le prend. Que c'est bon d'être là à nouveau... Il monte les marches, il passe, tremblant, devant la loge de Lopez, il entre dans la fraîcheur des classes. Il a sorti son Akarelle, il prend cinq photos, et il revient. Nous vous livrons ces cinq clichés tout frais, encore tout imprégnés de cette atmosphère si particulière de juin 1958, vous vous en souvenez, n'est-ce-pas ? Sentez les, si si, encore, insistez, formidable, non ? Une lègère odeur de citron ? Celle des créponés de chez Grosoli rue Auber ? Peut-être, c'est de saison... Et d'huile solaire, aussi, non ? Hier dimanche, déjà on est allés à Sidi-Ferruch ! Et cette effluve ténue d'encre fraîche sur le bout des doigts, aussi, oui, celle de Spirou ? De Tintin ? En tout cas des illustrés de chez madame Leblois... Sentez encore... Oui, aussi ce parfum d'éternité... Comme tout paraissait apaisé ces jours là, rappelez-vous, une odeur de paix retrouvée et de vacances bien méritées... C'est juin 58, on n'a déjà plus tellement envie de travailler, les rues sont vides sous le soleil, De Gaulle est au forum, les sauterelles sont dans la cour, l'Algérie est française pour toujours et on est tous des frères. Que souhaiter à toute l'humanité de 2002 ? Sinon de connaître une fois, même rien qu'une fois ça suffit, ce bonheur ample et paisible, mais à condition que ça dure, parce que je sais pas si vous êtes au courant, ça a pas duré ! Et après ça fait mal, longtemps....
P.S. 1 : Cher Jean Claude, excuse moi ce délire, mais à la vue de tes photos, c'est vraiment ce que ça m'a inspiré, un vrai retour, comme jamais ça m'était arrivé. Un flash, comme disent les drogués, mais un flash back. Encore mille merci ! Car en réalité, cher lecteur, je vais te décevoir, Jean Claude n'a pas voyagé dans le Temps :
"Elles n'ont pas été toutes prises le même jour. J'ai bien sûr demandé l'autorisation à chaque professeur et si je n'ai que quatre photos en salles de classe, c'est que les autres ont refusé, de peur de chahut, je suppose. A l'époque des Retinettes et autres Foca Sport, je m'étais fait offrir par mes parents un appareil d'origine allemande peu connu en France, un AKARELLE. J'ai hérité assez tôt, d'un de mes grands-pères, du vice de la photo, et si la plupart de mes sujets étaient familiaux, j'essayais de temps en temps de me diversifier, d'où cette petite série à Gautier.
J'avais été conseillé dans mon achat par l'un des frères Guedj qui tenaient le magasin "labo photo", situé rue Colonna d'Ornano. Cet appareil, que je possède toujours et qui doit toujours être en état de marche, avait la particularité pour un appareil à obturateur central d'avoir l'objectif interchangeable. Mon exemplaire est muni d'un très bon Xenar qui avait presque autant de piqué que le Tessar du Rolleiflex de mon Grand-père. J'ai même conservé le mode d'emploi, en voici la couverture" (Jean-Claude Saladin, 06 février 2002).
P.S. 2 : avis aux chrononautes ! Ceux qui ne font pas l'effort de plonger dans leur fonds de tiroirs, leurs malles au grenier, les affaires de leurs parents, y savent pas de quelles joies ils se privent ! Vous me croyez pas ? Vérifiez, allez-y, allez-y ! Vous nous en direz des nouvelles ! Les cardiaques, quand même allez-y mollo, les coups au coeur sont fréquents et violents, pas plus d'une heure par jour en apnée dans les vieux papiers !