En images chez Maurice Faglin...
Par Michèle SALERIO
Eh oui, j'ai rencontré Maurice Faglin dit "Missou" et sa soeur Christiane. Ma visite avait été annoncée par Jean qui les connaît depuis toujours...
Je suis donc arrivée le jour dit, tenant serré dans mon sac le "prétexte" de ma venue : la photo d'équipe, religieusement sortie depuis quelques années des cartons où sa couleur sépia commençait à dépérir. J'ai été chaleureusement reçue par l'auteur en personne d' "Il était une fois le RUA" et Christiane, dans leur jolie résidence de Saint-Cyr-S/Mer, où ils vivent une bien agréable retraite. Autour du cou de Maurice, on peut voir ci-dessous l'écharpe aux couleurs du RUA ; en soie et peinte à la main à son intention, cette écharpe se trouve habituellement sur une étagère de sa chambre à portée de regard.
La vue du document-trophée que je lui amenais a immédiatement déclenché chez "Missou" des souvenirs en cascade. Il me raconta avec une irrésistible volubilité que la photo avait été prise au cours de la saison 1933/34 devant le grillage séparant le Stade municipal du Jardin d'Essai ; que cette équipe avait gagné deux années de suite le Championnat d'Afrique du Nord française (coupe Steeg (1), du nom d'un gouverneur général en Algérie). J'apprenais ainsi que mon père avait joué en réserve avec Georges, le frère aîné de Maurice et quelques joueurs émérites parmi ceux qui constituèrent la "dream team" du club universitaire... avant de rejoindre l'ASSE. "Parce qu'ils étaient de Nelson", dit "Missou" en évoquant ces "émigrants" vers Saint-Eugène.
Ci-dessous, deux images qui évoquent le passé le plus heureux : Akbou, belle et fière, veillant sur le sommeil de Missou, et la Coupe de l'Amitié, photographiées ENSEMBLE. Avec Christiane, qui a vaillamment transporté le trophée sur la table de chevet de Maurice, nous n'avons pas hésité un seul instant. Cette image serait tout un symbole : le parcours d'une vie accomplie, commencée en Kabylie dans cette petite ville de l'Algérie profonde, puis entièrement vouée au sport, au RUA, aux équipiers, talentueux ou non (tous clubs confondus), le coeur pris au piège d'Alger, de L'Algérie... à jamais !
La Coupe de l'Amitié était disputée chaque année entre les clubs vainqueurs d'Alger et d'Oran. Elle fut rapatriée depuis la Maison des Étudiants par Lucien Richardoz, propriétaire du "Coq Hardi" et du "Laferrière" et membre du conseil d'administration du RUA, qui estima à juste titre que Maurice devait en "hériter".
Enfin, cette dédicace d'Albert Camus que Missou fut si fier de me montrer et moi, si émue de lire ! Elle fut écrite un soir du printemps de 1955, à Alger, dans un bar du boulevard Baudin, tout près de la Maison des Étudiants, lors d'une réception organisée en l'honneur de l'écrivain par ses anciens compagnons ruaïstes. À cette époque, pour ceux qui l'aimaient ou l'appréciaient, les visites de Camus dans notre capitale étaient d'autant plus précieuses qu'elles étaient rares. Étaient présents, aux côtés du directeur de la Jeunesse et des Sports, les principaux dirigeants et personnalités du RUA dont Maurice Faglin, ainsi que des représentants du "Journal d'Alger" parmi lesquels Fernand Carreras, Mohammed Kheddis et Edmond Brua. Ce soir-là, Maurice était arrivé à la réception avec une édition, récemment acquise, de La Peste : une amie l'avait pressé, puisqu'il allait LE rencontrer, de faire dédicacer le livre par son auteur. On ne peut qu'être bouleversé par cette phrase toute simple où se reconnaît le sentiment de fraternité de celui qui devait obtenir deux ans plus tard le Prix Nobel de Littérature. À noter que Georges, le frère de Maurice, auquel la dédicace fait allusion, avait été l'un des coéquipiers de Camus en équipe juniors et l'un de ses plus proches amis de lycée.
M.S.
NB : Je remercie Christiane, Maurice et Jean, pour m'avoir aidée à découvrir un autre moment privilégié de la prime jeunesse de mon père : celui qu'avec bonheur, il consacra au sport.
(1) Théodore Steeg (1921-25)
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