Ça aurait pu être l'objet de l'une de nos questions pour le QUIZZ de l'été, "Mais qu'est-ce donc que ce trou de Lamoricière ?". Mais avec Internet, il faut se méfier, un petit coup de GOOGLE, et on a les réponses aux questions les plus tordues... Alors, ne cherchez pas, on va vous dire ce qu'était le trou de Lamoricière. Non, ce n'était pas le trou de la balle qui le frappa le 13 octobre 1837, lors de la prise de Constantine, puisque ce jour là il ne fut pas victime d'une balle mais du souffle et des brûlures causées par l'explosion d'une poudrière. Ce que célèbre ce bas-relief de sa statue (anciennement à Constantine, et, depuis l'Exode, en exil à côté de Nantes) avec cette version héroïque du jeune colonel entouré de ses fidèles Zouaves. À cette date, Lamoricière avait déjà fait son trou. Les Zouaves, mais bon sang, bien sûr ! Vous brûlez, vous y êtes ! En 1831 le jeune capitaine Lamoricière avait été chargé d'organiser le corps des Zouaves, et c'est lui qui décida de leur uniforme (en fait dessiné par le commandant Duvivier) Et, une fois inventé cet uniforme invraisemblablement peu pratique dont il ne fut pas peu responsable, c'est lui, Lamoricière, qui dut faire face aux conséquences navrantes que ne manqua pas de susciter une tenue si mal pensée... Par exemple, quand les Zouaves passent à gué un oued pas à sec, comment ils font ensuite, quand ils ne peuvent même plus avancer tellement leur pantalon façon "sarouel" il est plein d'eau ? C'est là que Lamoricière n'est pas seulement un esprit impétueux mais aussi un véritable inventeur qui a pleinement sa place dans cette rubrique. Il se saisit d'une paire de ciseaux, et, au fur et à mesure que ses braves zouzous atteignent la rive opposée, il leur taille un trou dans le fond du pantalon. Ils sont surpris, mais comprennent vite qu'il s'agit là d'un geste plein de sollicitude de la part du père du régiment (il n'est pas encore colonel ? Oui, certes, mais ce n'est pas encore un régiment, rien qu'un bataillon). Le tour est joué, l'eau peut s'écouler, les Zouaves repartent l'esprit (si je peux dire) léger, ils disent "merci patron !", en chantant leurs refrains habituels. Son nom restera désormais attaché à ce trou dont vous pouvez voir sur le croquis ci-dessous l'emplacement exact. Pour faire net, cette entaille sera en général bordée de cuir. Christophe Louis-Léon Juchault de Lamoricière n'est pas connu seulement pour son talent de tailleur expert en boutonnières vidangères. Jeune lieutenant, lors de la prise d'Alger en 1830 il avait hissé le drapeau français sur le palais beylical. C'est aussi lui qui en décembre 1847 recevra la soumission d'Abd El Kader, c'est lui encore qui en 1860 prendra le commandemant des troupes papales pour lesquelles il renouvellera avec un semblable succès sa recette préférée : la création de Zouaves, "pontificaux" cette fois, aux uniformes calqués sur ceux de ses premiers Zouaves. Il n'y avait plus de raison que ça s'arrête, et d'ailleurs ça ne s'est pas arrêté, s'ensuivirent des Zouaves polonais, des Zouaves américains, etc. Mais ceux-ci sont d'autres histoires... Et puis, étaient-ils dotés du trou ? C'est trou pour aujourd'hui. G.D. |