Chez nos anciens ...



Pour les 100 ans de Joséphine,
les armes d'Oran flottent sur Émile Pélicand !
(Bourg-en-Bresse, Ain)
Et par cartes postales, 100 de ses compatriotes
lui adressent leurs voeux !


Dessin de Jean Brua



Es'mmaïennes, Es'mmaïens, vous êtes formidables ! (bis)

   L'anniversaire de Joséphine Bossi a été une réussite totale ! (1)

   Pourquoi ? Parce que des gens de bonne volonté se sont impliqués, en nombre, sans tous se connaître entre eux, sans pour la plupart connaître Joséphine, mais ils ont fait le petit (ou le pas si petit) effort qui consiste à juste prendre sur soi, à faire un petit pas de côté, à se dire "allez, aujourd'hui, je me laisse pas avoir par l'habitude"...

   Ceci vaut d'abord pour le personnel soignant du service "Turquoise" où vit Joséphine. Même très démotivés par les conditions de plus en plus difficiles qui sont faites aux personnels des hôpitaux, tous avaient accepté d'être là, de rester un peu plus tard, ou d'être là en avance sur leur service, parce que pour que ça marche, une belle fête, il faut davantage de personnes pour faire un vrai service à table, pour débarrasser de vrais couverts, avec de vraies assiettes et pas les plateaux repas habituels, pour mettre les tables avec de vraies nappes et leurs décorations. Pour que le repas puisse s'éterniser, comme un vrai déjeuner de famille, quand on n'a rien à faire derrière, comme un long dimanche... Toutes s'étaient mises sur leur 31, elles étaient pas en blouse comme d'habitude, non, pour la plupart elles étaient en "civil", elles s'étaient faites pimpantes pour Joséphine, les infirmières, les aide-soignantes... Elles étaient comme autant de chouettes petits printemps avec un peu d'avance, et Joséphine était ravie de ces jolies jeunesses autour d'elle, qui venaient lui faire la bise et poser avec elle pour la photo. Et lui lire, de temps en temps, l'une puis l'autre de vos cartes, tirées au hasard dans le paquet im-pres-sion-nant.

   Parce que pour être gros, le paquet de cartes, il était gros ! Même que les postiers de Bourg-en-Bresse avaient remarqué le manège depuis quelques jours, ils s'étaient renseignés, et avaient sur l'une des enveloppes rajouté un très gentil message manuscrit à l'intention de Joséphine.

   Au matin du mardi, quand je me suis pointé dans le service pour installer dans la salle à manger mes banderoles avec une cinquantaine de fanions aux armes d'Oran recto-verso (les Algérois, merci de ne pas rigoler !), il y avait sur une table plusieurs lots de cartes et d'enveloppes reliées par des élastiques. Avec Madame Moinet, la cadre de santé qui s'occupe du service (sur les photos, elle porte un chemisier à rayures), on s'est mis à compter... Punaise ! 96 envois ! Quatre-vingt-seize ! Plusss un courriel ! Ça faisait 97 !

   Et pendant le repas, une aide-soignante est arrivée avec, posées sur un plateau, trois cartes qui étaient, on sait pas comment, passées à l'as ! Ou tombées d'un paquet... Ça faisait juste 100 ! Certains y verront la patte caractéristique de Notre Dame de Santa Cruz. En tout cas, si c'est pas un miracle, c'était la plus belle des coïncidences !

   Pour le déjeuner d'anniversaire, les cuisines de Fleyriat (c'est le nom qu'ici on donne à l'hosto) se sont surpassées. Les bons gros gâteaux d'anniversaire, ça, elles savent déjà faire ! C'est une recette qu'elles maîtrisent. Mais quand la cadre de santé du service où se trouve Joséphine leur demanda, au moins un mois avant le jour J (pour Joyeux Anniversaire), s'ils pouvaient confectionner un couscous, on a senti comme un flottement... L'hôpital est un monstre paresseux et autiste qui n'aime pas qu'on dérange ses habitudes... Tout prend du temps, il y a des appels d'offres, des commissions, des pesanteurs, du principe de précaution poussé à l'absurde... Mais les cuisiniers, eux aussi, prirent sur eux (intervention de Notre-Dame de Santa Cruz ?), et donc ils décidèrent d'innover... Pourtant, les povres, ils savaient pas dans quoi ils se lançaient ! Là, on les attendait un peu au tournant... Parce qu'un couscous, c'est bien connu, toujours "c'est çui de ma mère qu'il est le meilleur !".

   Eh bien les cuistots de Fleyriat ont réussi ce test décisif ! Leur couscous a été apprécié de la plupart des résidents présents à cette fête... Même ceux qui d'habitude chipotent, n'ont pas donné leur part aux chiens (c'est une façon de parler). La graine elle était correcte (mais un peu sèche, apparemment elle avait pas été roulée dans les règles), la sauce bien épicée mais pas piquante (pour les anciens, faut y aller mollo sur le harissa, lui préférer le "Ras el Hanout"), la viande bien aussi, et les légumes cuits comme il faut. Les merguez, elles étaient bonnes, quoiqu'un peu trop grasses (aigreurs dans la soirée, c'est pas bien), la prochaine fois, faudra dire à l'intendant de permettre d'acheter mieux. Il faut espérer que le couscous a définitivement fait son entrée à l'ordinaire des plats servis à l'hôpital de Bourg-en-Bresse, et à la maison de retraite Émile Pélicand. Ne riez pas, une innovation comme le couscous dans le monde hospitalier, c'est comme l'introduction de la pomme de terre en France : une révolution !

   La seule qui ait pas trop touché à son couscous, c'est Joséphine. Pourtant elle avait bien mangé la terrine de légumes de l'entrée, mais toutes ces marques d'affection des uns et des autres, "ça m'a émotionnée, disait-elle, ça m'a émotionnée, j'ai plus très faim".

   Qu'est ce que ç'aurait été si monsieur le Maire était venu lui serrer la main, comme ça se fait ! Mais Monsieur le Maire, Jean-Michel Bertrand, était décédé la semaine précédente (à 64 ans ! "Le povre, presqu'un enfant !", déplora Joséphine en souriant), et aucun de ses adjoints, trop lancés sans doute dans la campagne des élections municipales, n'a pensé à venir souhaiter son anniversaire à Joséphine. Mais elle prit cette absence, ainsi que celle du directeur de l'Hôpital, avec philosophie : "ça aurait été moins intime", jugea-t-elle.

   Oilà. Je sais que les Es'mmaïens ne vont pas oublier Joséphine comme ça... Qu'ils auront à coeur pour leurs prochaines vacances de la rajouter à la liste des destinataires de leurs cartes postales... Si vous saviez comme c'est bien de recevoir du courrier quand on s'ennuie ferme dans une maison de retraite ! Et de découvrir qu'on a plein d'amis inconnus aux quatre coins de France, et même au delà de nos frontières. (3)



Gérald



(1) Pour ceux qui seraient pas au courant et qui prendraient le train en marche (il faut penser à tout), on rappelle que Joséphine Bossi, délicieuse petite dame vive, ingambe (2) et malicieuse, résidente de la maison de retraite Emile Pélicand, en plein centre de Bourg-en-Bresse, fêtait ses 100 ans ce 26 février !

À Oran,Joséphine habitait au 15 rue Troubillon (à côté du boulevard Malakoff). Elle a deux fils, l'un (Claude) qui a travaillé à la mairie d'Oran, l'autre qui a travaillé à la banque BNCI.

Joséphine rêve de retrouver Aïcha, une demoiselle qui travaillait avec sa maman, et qui fut l'un de ces entourages familiaux qui contribuèrent à élever beaucoup d'entre nous.

(2) Les synonymes que le dictionnaire donne à "ingambe" : dispos, valide, gaillard, leste, allègre, solide, vaillant, frais. Eh bien, Joséphine est tout ça à la fois. Enfin elle est pas "gaillard", "vaillant" et "frais", mais gaillarde, vaillante et fraîche, bien sûr.

(3) Gaby, Joséphine t'embrasse, oui, tes deux envois depuis Alicante sont bien arrivés à temps, je les ai vus de mes yeux vus !
































Ci-dessus : Joséphine dans le journal avec l'équipe de son service ; Joséphine avec le couscous, avec les gâteaux, avec le café... Joséphine dansant avec Fathma (une infirmière battante, épatante de gentillesse et d'énergie). Joséphine avec une amie sous les fanions aux armes d'Oran ; Joséphine dépouillant le courrier avec Madame Moinet et le Docteur Bouillet. Deux des envois qui méritent le podium : une carte de Corse "faite maison" avec une découpe laissant apparaître du vrai mimosa, et une carte 1) avec gâteau en 3 dimensions, et 2) musicale, et 3) avec la flamme de la bougie qui s'allume par intermittence ! Joséphine est épatée devant tant d'innovations à la fois ! Le CD de Gaby avec plein de vues d'Oran, c'était pas mal non plus... Pour finir, ci-dessus, la carte que lui a envoyée Jean Brua. ...

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Es'mma !